Durant le séjour du 403e dans la Somme, ce 19 juillet fut pour le régiment son jour le plus noir. Le haut commandement avait prit la décision d’expérimenter sur les positions allemandes des obus d’un nouveau type. Les obus qui allaient être tirés ce jour-là étaient des projectiles de 75 incendiaires et asphyxiants à employer « contre les villages et les organisations complexes qui enrayent la dispersion des fumées. » (*). Et sur le front occupé par la 151e Division, c’est le secteur du « Bois allemand » qui s’est avéré le plus propice pour ce genre d’expérimentation.
Par la même occasion on en profiterait pour « détruire les organisation allemandes »
C’est au 2e bataillon, sous les ordres du commandant Frey, qu’échoua la mission d’attaquer ensuite le bois et de traverser les tranchées allemandes « jusqu’au rebord Sud d’une carrière située à l’intérieur du bois et fortement organisée par l’ennemi ». Avec l’aide du génie divisionnaire les hommes ont aussi pour mission de détruire l’entrée de plusieurs galeries allemandes et enfin de faire de prisonniers« afin de se rendre compte des effets des nouveaux obus »
A 9h du matin l’artillerie lourde entre en jeu et ouvre le feu sur les positions du bois allemand tandis que les hommes du 2e bataillon prennent places dans les abris des zones D et E. Celles-ci ont été en partie évacuée par le 3e bataillon du 410e qui s’y trouvait.
Entre 10h et 15h ce sont les canons de 75 et 58 qui entrent dans la danse tandis que l’artillerie lourde poursuit toujours son bombardement. Mais l’artillerie allemande riposte violemment sur les zones E, D, R2 et la carrière. Les parapets sont fortement endommagés et les boyaux d’accès en partie comblés.
Les obus « spéciaux » sont tirés à partir de 15h et ce jusqu’à 17h. Les observateurs constatent que des nuages de fumée « dense et blanche » s’élèvent sur toute la zone bombardée « qu’un léger vent venant de la direction du S.O. Pousse vers le ravin situé entre Fricourt et Mametz. » Dans leur compte rendu ils ajoutent « qu’en éclatant les obus dégage une flamme plus haute et importante que celle produite par les obus ordinaires ».
A 17h-17h30 on procède, à l’aide d’obus explosifs à un tir dit « de ventilation ».
Entre 17h30 et 18h un violent bombardement d’artillerie a lieu de part et d’autre des lignes. A 18h l’artillerie française allonge le tir et l’attaque d’infanterie est lancée.
La 6e Cie, commandée par le capitaine Page, et la 7e Cie, commandée par le capitaine Chausson, franchissent le parapet mais sont prises sous le feu des mitrailleuses. Malgré tout quelques hommes atteignent la 2e ligne allemande mais il s’avère impossible de pénétrer dans la carrière. Ils se trouvent en présence de troupes prêtes à la contre-attaque.
Selon le JMO de la 151e Division, devant la vigueur de la défense ennemie, le commandant Frey fait arrêter l’attaque aussitôt qu’il est informé de la prise de cinq prisonniers.
Le rapport du JMO de la 301e Brigade quant à lui diffère un peu. En effet, selon ce dernier, c’est à 18h35 que le commandant Frey, jugeant sa mission accomplie par la prise de cinq prisonniers, donne le signal de repli suivant en cela les ordres du commandement supérieur qui stipulaient de ne pas conserver le terrain conquis. Toujours selon ce rapport le mouvement s’exécute en bon ordre sous le feu nourri des Allemands et les tirs violents de leur artillerie.
Selon le JMO de la 151e DI, les prisonniers en question ont été faits dans les tranchées de première ligne allemandes et il s’avère qu’ils n’ont pas du tout souffert ni du bombardement, ni des tirs d’obus spéciaux ! « Ils ont seulement constaté la production d’un nuage de fumée très épais qui les a plongé dans une presque totale obscurité » Force est de constater que ces obus n’ont donc produit aucun effet !!! D’ailleurs, après l’attaque, les hommes rendront compte qu’ils n’ont trouvé sur le terrain aucun allemand asphyxié.
Pour le 403e ce « coup de main » aura mis hors combat 108 hommes parmi lesquels ont compterait 38 tués, 59 blessés et 18 disparus. Selon un rapport du commandant de la 301e brigade, ces pertes seraient dues, en majorité aux bombardements. Mais plusieurs hommes, dont le capitaine Page, ont été fauchés par les mitrailleuses ennemies qui n’avaient, malgré les bombardements, pas été détruites.
Ci-après et par ordre alphabétique, la liste non exhaustive des hommes tués, disparus ou blessés lors de cette attaque :
Tués :
BELLAMY Jean, Louis – soldat – inhumé en la nécropole nationale de Bray-sur-Somme
COLLESSON Georges, René – 2e classe – lieu d’inhumation non connu
DELANCIZE Eugène, Victor caporal lieu d’inhumation non connu
DELAS Auguste, Eugène – soldat – inhumé en la nécropole nationale de Bray-sur-Somme
DERAIS Jules, Léon – sergent – lieu d’inhumation non connu
DUHAMEL Jules, Raoul – soldat – inhumé en la nécropole nationale d’Albert
GALBADON Alexandre, Auguste – soldat- lieu d’inhumation non connu
HELUIN André, Albert – 2e classe – lieu d’inhumation non connu.
JULIA Paul, Ernest – soldat – lieu d’inhumation non connu.
JUSTIN Gaston, Alexandre – soldat – inhumé en la nécropole nationale de Bray sur Somme
LAURIER Georges, Fernand – caporal – inhumé en la nécropole nationale de Bray sur Somme
LECARDINAL Louis, Edmond – 2e classe – lieu d’inhumation non connu
LECLERC Fernand, Charles – 2e classe – inhumé en la nécropole nationale de Bray sur Somme
LEFEVRE Alexis, Louis – 2e classe – lieu d’inhumation non connu
LEMAHIEU Léon, Gustave, Joseph – 2e classe – 7e cie – lieu d’inhumation non connu.
LESENE Maurice, Victor – 2e classe – inhumé en la nécropole de Bray sur Somme
LIETOT André, Louis – 2e classe (7e Cie) – inhumé en la nécropole de Bray sur Somme
LOUVEL Georges, Henri – 2e classe – lieu d’inhumation non connu
MARIE Gustave, Albert – 2e classe – inhumé en la nécropole de Bray sur Somme
MARIE François, Gustave – 2e classe – inhumé en la nécropole de Bray sur Somme
MOLEUR Antony – 2e classe – inhumé en la nécropole de Bray sur Somme
MOURIER Jules, Alexandre – 2e classe (7e Cie) – inhumé en la nécropole de Bray sur Somme
NICOLLE Jean, Félix – médecin auxiliaire – lieu d’inhumation non connu
PAGE Camille, Gustave – capitaine (6e Cie) – inhumé en la nécropole de Bray sur Somme
PEZANT Jules, Alexandre – 2e classe (6e Cie) – inhumé en la nécropole de Bray sur Somme
PIPREL Constant, Léon – 2e classe – il serait inhumé dans le carré militaire de Caen
PLOUIN Eugène, Constant – 2e classe – inhumé en la nécropole de Bray sur Somme
TABON André, Charles – sergent – lieu d’inhumation non connu
Disparus :
ANDRIN Eugène – caporal
AUTIN Henri – caporal – (6e Cie)
CREMER Marius, Charles – aspirant
CHION Ernest, Victor – 2e classe
COLIN Yves, Marie – 2e classe – présumé disparu
CORBIN Théodore, Pierre – sergent-major – (6e Cie) – présumé disparu
GARRETA Pierre, Saïd – sergent fourrier – (6e Cie)
HILBERGER Jacques, Gabriel – soldat
LEJOUAILLE Gérard – caporal
MARIE Désiré, Alphonse dit « Mourocq » – 2e classe
NICOLAS Fernand, Léon – 2e classe – déclaré disparu
RAMBURE Albert, Louis – 2e classe
RICHARD Albert, Alexis – 2e classe
ROBERT Jean, Alexandre – sous-lieutenant
TASSEL Raoul, Louis – 2e classe
Décédés des suites de leurs blessures :
COURATIER Henri, Frédéric – soldat – inhumé en la nécropole nationale « Cote 80 » à Etinehem
ROSTAING Alfred, Auguste – 2e classe – inhumé en la nécropole nationale « Cote 80 » à Etinehem
Non confirmé avoir été blessés lors de ce coup de main mais dcd des suites de leurs blessures :
De SAINT MARTIN Auguste, Pierre – soldat – dcd le 19 juillet à l’ambulance 3/151 à Etinehem – inhumé en la nécropole nationale « Cote 80 » à Etinehem.
MALHERBE Ferdinand, Louis, Henri – soldat à la 8e cie dcd le 20 juillet à l’ambulance 3/151 à Etinehem. Lieu d’inhumation non connu.
Un soldat dont le nom a été retrouvé et qui figure parmi les nombreux blessés :
ROCHE Albert (remis de ses blessures il passera au 39e R.I et sera malheureusement tué devant Verdun le 23 juin 1916)
Blessé et fait prisonnier : LAUTUN Désiré – 2e classe – (6e Cie) qui décèdera le 25 novembre 1918.
(*) Les termes en italique sont tels que repris dans le JMO de la 301e Brigade